Cette histoire simple
comme bonjour
celle de Marcellin
et de Francine Dumoulin,
retrouvés, soixante-quinze ans
après leur disparition,
sous le glacier des Diablerets,
enlacés, corps enchevêtrés,
prisonniers d’une gangue de glace
qui sut préserver intact,
en plus de leurs dépouilles,
ce précieux viatique.
Pensez !...
une bouteille de limonade,
une lampe tempête,
un bouquet de fleurs séchées,
les baleines de leur parapluie…
Je songe à leurs préparatifs,
hâtifs, à l’aube d’un jour nouveau,
un jour si semblable à tant d’autres ;
comme à l’accoutumé,
pas partis pour longtemps,
pas non plus, prévu
de ne jamais revenir.
Le bétail attendra là-haut, les enfants aussi restés sagement dans la vallée, les plus grands, veillant sur les plus petits… Et puis, du jour au lendemain, la fratrie dispersée aux quatre vents.
Deux survivantes, deux filles, encore de ce monde, devenues, avant longtemps,
d’alertes octogénaires. Pas grandies sous le même toit, presque étrangères
l’une à l’autre, mais les voilà enfin consolées d’une irréparable perte.
Les corps des parents
enfin rendus
à leur terre natale,
leurs os mêlés, ensevelis
dans l’enclos paroissial,
en cet endroit où,
on saura bien et à coup sûr
maintenant les y retrouver.
Finies et bien finies, les errances,
de Candide (leur fils et frère décédé),
en motoneige, autrefois,
sur ce foutu glacier :
« Et là, dites, je brûle ?
ô Papa, ô Maman !
Où êtes-vous, à la fin ? »